Les bouleversements de la révolution, s’ils pouvaient donner une chance inouïe
aux bretons, ne furent pas assimilés à temps et l’élan révolutionnaire
parti de l’ouest, revint dans cette région, l’esprit légèrement dénaturé et
jacobin par rapport aux sentiments premiers. Avec la chute de Napoléon
et la première révolution industrielle, le romantisme s’imposa
en contre-courant de la pensée économique contemporaine et industrieuse. Aux
machines et au charbon répondirent les ruines antiques et les civilisations
perdues. Evoluant dans un cercle intellectuel breton, Théodore
Hersart de La Villemarqué (Kervarker) publia, en 1939, la première
édition de son livre, le Barzaz Breiz (Barzhaz Breizh).
Ce livre provoqua un raz de marée romantique, propulsant pour la première fois
hors de ses frontières la culture bretonne. Présentant son œuvre comme le témoin
d’une civilisation, mère des civilisations, et cependant mourante, La
Villemarqué lança une mode durable. Son Barzaz Breiz
fut réédité plusieurs fois, jusqu’en 1867 (dernière édition retravaillée de
La Villemarqué). Au même moment, alléchés par cette découverte,
de nombreux érudits allèrent, à leur tour, faire part de leurs connaissances
: De Luzel à Le Braz, de nombreux collecteurs
firent ainsi publier une grande partie de la mémoire vivante
bretonne, lui offrant, sans s’en rendre compte, une certaine
immortalité. Bien que ces travaux et notamment ceux de La Villemarqué
furent très critiqués, jusqu’au dégoût de l’œuvre, cette vague portait en elle-même
le germe des suivantes. C’est avec Maurice Duhamel qu’elle
prit fin, avant la première guerre mondiale. Cette guerre, particulièrement
meurtrière à l’égard des jeunes bretons, transforma profondément
la société traditionnelle. Entamant son travail de déculturation, l’Etat, par
son soucis de francisation, d’homogénéité nationale, permit la mise à mort de
cet univers dont, aujourd’hui, les locuteurs ne se comptent plus que par milliers,
lorsqu’ils étaient plusieurs millions un siècle plus tôt.
C’est en 1920 que les prémisses du revival des années soixante-dix
se firent sentir. Avec l’apparition du nationalisme breton structuré, politique
et militaire (premiers attentats bretons en 1932) émergèrent une nouvelle conscience
bretonne, bien plus virulente que la précédente, rejetant le romantisme.
Cette "prise de conscience", cependant bien timide, ne prendra son
envol qu’à la veille de la seconde guerre mondiale, pour s’éteindre immédiatement
après, pour des dérives ayant eut lieu durant cette guerre.
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Jeremie Pierre JOUAN