Voyant ce patrimoine décliner et progressivement disparaître,
également imprégnés de romantisme (réaction intellectuelle
à l’industrialisation, préconisant sur le modèle de Rousseau,
le retour à la vie du bon sauvage, à la Nature, mère protectrice)
quelques lettrés bretons vont parcourir la Bretagne
à la recherche de thèmes traditionnels à collecter
auprès des détenteurs de ce savoir paysan.
C’est ainsi que Théodore Hersart de la Villemarqué, François-Marie
Luzel, Louis-Albert Bourgault-Ducoudray vont se lancer
dans une entreprise culturelle, dont nous pouvons aujourd’hui
apprécier l’existence. C’est à l’initiative du premier et de son fameux recueil
du Barzaz Breiz que va naître un engouement formidable pour
la matière bretonne, engouement récurrent, puisque le Moyen-Âge
avait déjà connu son heure bretonne, avant qu’en 1690 ne sortent
les poèmes d’Ossian relançant au passage la culture
celtique.
Mais cette formidable recherche musicale, véritable encyclopédie
de l’oralité locale, ne put échapper à la critique. Certains thèmes
ainsi collectés furent arrangés, réécris, réorchestrés, afin
de convenir aux besoins de l’époque, à la nécessité romantique,
à la conception d’alors d’un monde breton directement issu
de l’épopée gauloise (oubliant par la même la colonisation
de l’Armorique par les bretons) ou d’essence
celtique préchrétienne (selon l’Académie de
Bretagne, la culture bretonne descendait en ligne
droite de celle des celtes, bien que plusieurs siècles de rattachement
à la France faisait de cette région un ensemble de moins en moins bretonnant).
Comme ces fausses colonnades grecques ou ces ruines
que l’on installait dans son jardin pour le vieillir, cet élan intellectuel
participa dans un premier temps à la dénaturation de l’imaginaire breton.
Etaient laissés de côtés les thèmes jugés trop populaires,
trop récents ou incompris. De plus, certains collecteurs n’ayant
aucune connaissance musicale oublièrent la transcription de
la musique, permettant sa disparition, laissant des thèmes,
aujourd’hui, orphelins de leur mélodie.
Ce travail entamé dès les années 1830 se poursuivit, en l’état durant un siècle,
avec entre autre Maurice Duhamel et Loeiz Herrieu.
Suite de l'article
Jeremie Pierre JOUAN